La Saosnoise
Descendante directe de la population Mancelle qui peuplait autrefois le carrefour de la Normandie, de la Bretagne et de la Touraine, cette vache est un témoignage « archéo-génétique » de tout premier ordre.
Sa rusticité fait miracle ; même sur des terres très pauvres, les vaches nourrissent parfaitement leurs veaux, « on a l’habitude de dire que les bœufs de la race Mancelle étaient les derniers à parvenir dans les grasses prairies d’engraissement et les premiers à en sortir *». Les « façonneurs » de cet animal ont été bien inspirés par leur position géographique qui leur a permis de glaner et de se réapproprier les réussites de leurs voisins. On trouve dans ses origines de la Bretonne, de la Normande, de la Poitevine et même un peu de sang suisse à travers l’introduction du taureau Fribourgeois au cours du XVIIIe siècle. Néanmoins, elle sera victime, comme toutes les races de la moitié nord du pays, de l’introduction en 1846 de sang Durham-Shorthorn en provenance d’outre-Manche, qui modernise à l’excès les populations locales : des animaux très performants, mais trop exigeants en aliments que les paysans ne possèdent pas.
Elle est l’une des rares races à avoir été soutenue par deux plans de sauvegarde * . Dès 1902, L. Legludic, homme politique visionnaire, aborde le fait que l’introduction de nouvelles pratiques totalement inadaptées au territoire et aux savoir-faire locaux est un risque fondamental pour la bonne marche de l’élevage. En adhérant à cet appel, les paysans d’alors marqueront un mouvement qui ne se démentira pas jusqu'à nos jours.
Depuis plus d’un siècle, malgré les deux guerres et les « trente glorieuses », les éleveurs du Saosnois, soutenus par des bouchers locaux, ont réussi à conserver et à nous transmettre les spécificités de ce bétail. Environ 1 200 ** femelles partagent ce petit secteur géographique délimité par les villes du Mans, d’Alençon et de Mamers. Aujourd’hui, le bétail Saosnois est reconnu race depuis l’an 2000. Classé en race menacée à petit effectif, son cheptel se divise en quatre types : Caille-blond, Manceau, Durham et Percheron.
Grâce à sa non-élection précoce au titre de race qui aurait à coup sûr entraîné une réduction des phénotypes, comme c’est le cas au sein de la race Normande, la Saosnoise a pu transmettre sporadiquement l’expression de quelques traits de l’ancienne « vache Percheronne ».
TORRIDE, vache Saosnoise reconnue du type « Manceau », a été photographiée chez Olivier Grouas à l’automne 2006, Marolles-les-Brault.
* L. Legludic, La race Mancelle, sa reconstitution, imprimerie sarthoise, 1902.
** Laurent Avon, la race bovine Saosnoise, situation au 31 décembre 2006, compte rendu n°010676 152, collection résultats, institut de l’élevage.